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Gail Ouellette, Ph.D. (génétique), Regroupement québécois des maladies orphelines, C.P. 22029 Quatre Saisons, Sherbrooke, Québec, Canada J1E 4B4.
Article publié dans le Journal de Réadaptation médicale (Elsevier), 03/2013 33 (1) 3-6.
La première journée de conférences a été consacrée à l'infiniment petit, c'est-à-dire aux aspects moléculaires du SED. Ce qui n’est pas visible au microscope ordinaire mais au microscope électronique ou par des méthodes de laboratoire qui analysent les protéines ou l'ADN. La fameuse molécule de « collagène » a été en vedette. En effet, le SED est une maladie du tissu conjonctif qui, entre autres, a une fonction de soutien et de protection. Il permet à nos organes et à notre corps entier d’être stable sans être trop rigide, tout en étant assez flexible. Le collagène est une protéine (la plus abondante dans l'organisme humain) qui est secrétée par les cellules du tissu conjonctif. (Le mot "collagène", originaire du grec, veut dire "production de colle"; le collagène est une colle naturelle).
Ce serait si simple de pouvoir dire que le collagène est en cause dans le SED, mais comme les conférencier(ère)s l'ont démontré, c’est bien plus compliqué! D'abord, il y a près d'une trentaine de molécules de collagènes différentes et ces molécules sont modifiées par d'autres types de protéines (les enzymes) et elles interagissent avec un grand nombre d'autres molécules. Tout cela pour former des fibres et produire un tissu fibreux qui a ces propriétés de soutien et de résistance à l'étirement.
Pour résumer, les chercheur(e)s aujourd'hui ont montré comment des mutations (défauts) dans des gènes de collagènes et d'autres molécules (donc des changements au niveau de l'ADN) ont un impact sur la production des collagènes, sur leur structure, sur leur transport dans la cellule, sur leurs interactions avec d'autres molécules, étant responsables de cette façon des différents types de SED et mêmes d'autres maladies neuromusculaires apparentées. La plupart de ces laboratoires utilisent des modèles de souris pour étudier le syndrome. On enlève un gène à la souris ou on le rend inactif et on observe le résultat: sa peau va devenir très élastique ou fragile, elle va développer une scoliose ou elle va avoir des altérations des tendons, etc.
La Docteure Fransiska Malfait (Université de Gand en Belgique) a décrit ses travaux sur le type « SED classique » pour lequel on connaît deux gènes impliqués, deux gènes du collagène de type V. Elle a analysé les deux gènes chez 126 patients répondant aux critères du SED classique et a trouvé une défectuosité chez 86 d'entre eux. Donc, on ne trouve pas toujours une mutation dans l'ADN. La Dr. Malfait conseille donc de procéder par la séquence suivante pour les tests dans le type classique: 1) test génétique du gène no. 1 de collagène V; 2) test génétique du gène no. 2 de collagène V; et si les deux sont négatifs, 3) faire les tests biochimiques et l'analyse de microscopie électronique du collagène V.
Plusieurs personnes ont soulevé le problème de la différenciation entre le SED de type classique et le type « hypermobile ». Curieusement, le type hypermobile est l'un des seuls types de SED pour lequel on n'a pas encore trouvé un gène majeur qui y est associé. En effet, il y a chevauchement des signes et symptômes avec le type classique, donc certains se demandent s'ils devraient faire les tests de collagène V dans tous les cas de SED classique et hypermobile confondus. Cela va être discuté par la suite.
Une constatation intéressante: il y aurait plusieurs femmes avec un SED diagnostiqué classique ou hypermobile qui seraient, en fait, porteuses d'une mutation du gène de la ténascine X à l’origine d’une forme rare récessive de SED ("récessif" signifiant que les deux parents sont porteurs d'une mutation et qu'il y a 25% de probabilité que leurs enfants soient atteints). En conséquence, ces femmes croient qu’elles pourraient transmettre le syndrome à leurs enfants comme dans les formes dominantes les plus courantes, c'est-à-dire avec une probabilité de 50%, alors que ce n'est pas le cas.
Consensus de recommandations fait par un panel d’experts à la fin de la session de présentations sur le SED type hypermobile et les autres syndromes d’hypermobilité :
(Panel : Lars Remvig, rhumatologie, Hôpital universitaire de Copenhague, Danemark ; Lies Rombaut, kinésithérapie, Université de Gand, Belgique ; Rodney Grahame, rhumatologie, University College London, Londres, Grande-Bretagne ; Bradley Tinkle, Génétique Médicale, (Advocate Lutheran General, Chicago, États-Unis ; Jaime F. Bravo, rhumatologue, University of Chile Medical School, Santiago, Chili).
Quelques présentations :
Bradley Tinkle, médecin généticien, a tenté de résumer en 20 minutes les signes, symptômes et évolution du SED type hypermobile, mais il a manqué de temps! En effet, il y a tellement plus de signes et symptômes que ceux généralement décrits (hypermobilité des articulations; peau douce, veloutée avec ou sans hyperétirabilité; luxations à répétition; douleur chronique; histoire familiale positive) qu’il n’a pu les lister tous en 20 minutes. Cependant, il a affirmé qu’il y a beaucoup de chevauchement entre le syndrome de articulations hypermobiles (JHS en anglais) et le SED type hypermobile et que, selon lui, ce sont deux syndromes indistincts. Il explique cela par le fait que le SED type hypermobile est très variable et hétérogène. Il est difficile aussi de distinguer le SED type hypermobile de formes légères du SED classique, du syndrome des articulations hypermobiles marfanoïde et des formes causées par les mutations dans le gène de la Ténascine X.
Lars Remvig, rhumatologue : a été très direct en exprimant son désarroi devant les différentes techniques et critères utilisés dans les différentes cliniques pour diagnostiquer l’hypermobilité des articulations et l’étirabilité de la peau. Il a montré une série de photos des différentes méthodes d’examen et des façons d’interpréter les résultats pour le test du cinquième doigt, du pouce et de la peau. Les manières de mesurer l’échelle de Beighton et de décrire l’apparence de la peau sont inconsistantes. De plus, les critères ne peuvent être les mêmes pour les enfants que pour les adultes. Il conclut : « on ne parle pas le même langage, on ne sait pas quoi faire ». Il faut faire l’éducation des médecins sur ce plan, dit-il. Le Dr Remvig a fait une enquête auprès de 15 spécialistes du SED pour déterminer quels tests et quels critères l’on devrait utiliser pour évaluer: 1) l’hypermobilité généralisée des articulations, 2) le SED de type hypermobile et 3) le syndrome d’hypermobilité simple des articulations. Les réponses du groupe étaient très hétérogènes et il n’y a pas eu de consensus suffisant pour proposer une procédure.
Lies Rombat, physiothérapeute : a fait une étude comparative de 32 femmes atteintes de SED type hypermobile (SED-HM) vs 32 femmes non atteintes. Conclusions significatives pour le groupe SED hypermobile : 100% ont des douleur articulaires; 96% des luxations; 67% des crampes musculaires; 26% des tendinites; 30% des maux de tête; 26% de la fatigue. Les mesures de qualité de vie objectivent une qualité de vie réduite chez les femmes atteintes de SED-HM, avec une diminution de leurs capacités fonctionnelles et de leur inclusion sociale.
Deuxième étude sur la douleur chez 72 personnes SED-HM, 69 personnes atteintes de fibromyalgie et 65 avec une polyarthrite rhumatoïde. La douleur exprimée était à peu près la même dans les trois groupes, mais pour le groupe de SED-HM, il y avait plus de dysfonctionnement musculaire et plus de problèmes de peau. Les personnes souffrant de fibromyalgie exprimaient davantage de fatigue. La mesure de qualité de vie entre les groupes a montré que le niveau de qualité de vie était similaire entre les groupes de SED-HM et fibromyalgie et pire pour ces deux groupes que pour le groupe polyarthrite rhumatoïde.Anil Manke (Baltimore, États-Unis) : étude comparative du diagnostic clinique et des symptômes autres que musculo-squelettiques chez des patients avec SED-HM et SED classique; étude de 300 patients sur 3 ans. Conclusion : ils n’ont pas trouvé de différences cliniques significatives entre les deux groupes.
Ce type, plus rare que le SED hypermobile, est associé à des mutations dans un gène du collagène III, donc il est possible de faire le test génétique pour savoir si la personne est à risque de complications cardiovasculaires et durant la grossesse et l'accouchement pour les femmes. Cependant, le Dr James Black (John Hopkins University School of Medicine, Baltimore) a affirmé que des complications cardiovasculaires peuvent aussi se présenter chez les personnes atteintes de SED hypermobile et de SED classique, mais que ces dernières sont moins rapportées dans la littérature médicale. Cependant, dans les SED hypermobile et classique, en général, ces événements arrivent plus tard dans la vie et le tabagisme accroît le risque.
65 posters ont été présentés.
Pr. Claude Hamonet et collaborateurs, Hôtel-Dieu, Paris
1) Ehlers-Danlos (à propos de 664 cas). Étude statistique des symptômes et signes des 644 cas ayant un score de Beighton égal ou supérieur à 4/9.
- Les 7 données cliniques les plus significatives pour le diagnostic du SED :
- Douleurs : articulaires (98%), musculaires (82%), abdominales (77%), thoraciques (71%), génitales chez les femmes (75%), migraines (84%), hyperesthésie cutanée (39%).
- Fatigue : 96%
- Troubles proprioceptifs et de contrôle du mouvement : pseudo-entorses (86%), luxations (90%)
- Hypermobilité : 97%
- Altérations de la peau : minceur (91%), fragilité (87%), vergetures (64%), retard de cicatrisation (85%)
- Hémorragies : (92%)
- Caractère familial (incluant les formes frustres, incomplètes ou partielles) : 97%.
- Autres données cliniques significatives :
Manifestations digestives : reflux gastro-œsophagien (80%), constipation, ballonnements
Respiratoires : dyspnée (85%), blocages respiratoires, pseudo-asthme (65%)
Bucco-dentaires : douleurs, blocages, luxations des articulations temporo-maxillaires; fragilité dentaire, orthodontie; fragilité, douleurs, sécheresse des gencives; ORL : hyperacousie (85%), surdité, acouphènes, hyperosmie, vertiges Ophtalmologiques : fatigue visuelle (86%), myopie Gynécologiques et obstétricales : règles abondantes, accouchements difficiles (78%). Neurovégétatives et thermorégulation : frilosité (77%), sudations abondantes, pseudo-syndrome de Raynaud, fièvres inexpliquées, accélérations rythme cardiaque, palpitations cardiaques ; Vésico-sphinctériennes : diminution du besoin d’uriner, urgenturies, incontinence ; manifestations cognitives : altération mémoire de travail (69%), troubles attentionnels, difficultés de concentration, altérations des fonctions exécutives, troubles de l’orientation spatiale
- Autres, à investiguer : calculs vésiculaires, kystes, dystonie, tremblements, lésions évocatrices à l’IRM.
L’auteur insiste sur le rôle des facteurs endocriniens, climatologiques et des traumatismes.
2) Rétractions des muscles ischio-jambiers et syndrome d ’Ehlers -Danlos hypermobile. Conséquences sur la mesure du score de Beighton. Discussion sur la valeur de ce test. À propos de 119 cas.
Conclusion : 86% des personnes avec un SED hypermobile (sur 119 examinées) ont des rétractions des muscles ischio-jambiers. 73% de ces personnes perdent un point au score de Beighton (test paumes au sol), influençant le diagnostic. On devrait donc relativiser ce score. De plus, l’hypermobilité varie avec l’âge, le test peut être faussé par les douleurs et les contractures musculaires et certaines articulations importantes ne sont pas prises en compte dans ce test.
3) Food hypersensitivity in Ehlers-Danlos syndrome, B. Berglund, Karolinska Institute, Stockholm, Suède.
175 sur 250 personnes atteintes du SED ont rapport une hypersensibilité à au moins un aliment (119 à plus de 3 aliments). 84% ont une hypersensibilité aux glucides (soya, blé, pois, lait de vache, fromage), 88% au (noix, carottes, pêches, pommes de terre, prunes, pommes), 75% aux histamines (lait de vache, blanc d’œuf, poisson, orange, chocolat). Les symptômes rapportés sont : indigestion, démangeaisons, diarrhée, nausée, problèmes oraux et respiratoires.
4) Douleurs chroniques dans le Syndrome d’Ehlers-Danlos : une analyse clinique sur 131 patients. Arndt F. Et collaborateurs, University Center Schleswing-Holstein, Lubeck, Allemagne.
Étude sur 131 patients SED (classique, hypermobile et vasculaire). 69% des patients ont rapportés de la douleur chronique; 60% de la douleur constante (surtout type hypermobile), principalement articulaire; parmi les personnes ayant de la douleur, 61% ont expérimenté de la douleur associée à de l’exercice et 12% ont eu des douleurs spontanées, surtout des membres inférieurs. Environ un tiers des personnes ayant une douleur constante ou reliée à l’exercice ont aussi une fatigue chronique. Enfin, 52% des patients ont rapporté une capacité diminuée pour le travail physique, soit à cause de la douleur (59%) soit à cause de la fatigue chronique (41%).
Programme du symposium : http://www.eds2012.be/Programme.html
Conflits d’intérêt : il n’y a aucun conflit d’intérêt.