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Claude Hamonet

 

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Utilisation de l’oxygénothérapie dans la maladie d’Ehlers-Danlos

Conseils pratiques

 

Introduction. La maladie d’Ehlers-Danlos est une maladie héréditaire transmise à tous les enfants d’une personne atteinte (homme ou femme) mais avec une sévérité très variable, cinq fois plus handicapante dans le sexe féminin. Elle expose à des complications graves (hémorragies, occlusion intestinale, péritonite par appendicite ou cholécystite (calculs menaçant de perforer la vésicule très fréquents).
Les symptômes et signes suivants permettent le diagnostic : fatigue quotidienne importante, douleurs multiples avec crise, hypermobilités, hyperesthésies, difficultés motrices, hyperacousie, troubles gastrointestinaux, vésico-sphinctériens, vasomoteurs, cardiaques (tachyarythmies) et désordres respiratoires : dyspnée d’effort, blocages respiratoires, manifestations bronchiques et pharyngo laryngées, douleurs thoraciques avec blocages. Ces manifestations justifient en soi la prescription d’une oxygénothérapie mais nous avons constaté qu’elle permet aussi d’améliorer d’autres symptômes notamment la FATIGUE.

Matériel. Dans une première période nous avons utilisé le percussionnaire (recherchant un effet proprioceptif laryngé et bronchique) à la suite du grand pneumologue américain qui est son inventeur et avec qui j’ai pu travailler sur Ehlers-Danlos : Bird. Secondairement nous avons adopté une oxygénothérapie intermittente soit par extraction soit par bouteille, en privilégiant la première pour des commodités d’utilisation.

Masque ou voie nasale ? Le masque est souvent mal toléré chez ces patients à la peau fragile qui sont gênés par la compression sur les muscles du visage et les oreilles. Il empêche aussi de parler en particulier sur un portable. Il reste utile dans certains cas d’intolérance de la sonde œsophagienne qui n’est pas supprimée par l’application de xylocaïne visqueuse le long de la sonde.

L’extracteur. Il peut être gênant chez ces patients hyperacousiques et un casque (du type de ceux des travailleurs de chantier) peut être nécessaire ou bien des boules Quiès ou autres.

Le débit d’oxygène. Nous avons choisi un débit standard entre 3 et 5 litres par minute pour le traitement intermittent et un débit de 2 à 3 litres par minute pour ceux qui l’utilisent en permanence le la nuit ou/et le jour.

L’humidification. Elle doit être systématique car ces patients ont des troubles vasomoteurs et une sécheresse des voies respiratoires qui rend l’oxygénothérapie pénible.

La durée et la fréquence des séances intermittentes. Elle varie avec les besoins et la compatibilité avec une vie personnelle et professionnelle. Nous avons fait le choix de séances de 20 à 30 minutes trois fois dans la journée. Avec le temps et l’effet des autres traitements, le besoin d’oxygène peut diminuer de façon durable et même disparaître. Ceci autorise l’interruption avec restitution du matériel, une repise ultérieure étant toujours possible. Ceci doit être adapté aux besoins spontanés ou circonstanciels (activité physique), à l’emploi du temps (majoration en fin de semaine) mais aussi à l’évolution de la maladie. Un effet durable de l’amélioration, en association avec les autres traitements, peut conduire à l’arrêt de l’oxygénothérapie avec restitution du matériel. Elle pourra être reprise si l’état se détériore à nouveau.

Manifestations respiratoires dans le syndrome d'Ehlers-Danlos (EDS). Nouvelles options de soins

Journal de Réadaptation Médicale : Pratique et Formation en Médecine Physique et de Réadaptation, Volume 36, numéro 1, février 2016, pages 56-61

https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0242648X15001681

La physiopathologie respiratoire et l'oxygénation ont une place très importante dans la symptomatologie et les traitements du syndrome d'Ehlers-Danlos. Cet aspect était négligé et même oublié dans les descriptions initiales dominées par l'hypermobilité articulaire et l'étirabilité de la peau. Les données présentées ici sont extraites de l'étude d'une cohorte, initiée il y a 17 ans, de 2450 cas de syndrome d'Ehlers-Danlos. Les symptômes les plus fréquents sont la dyspnée (76 %), les crises de bradypnée inspiratoire (64 %), les bronchites (64 %), les affections des voies aériennes supérieures, surtout chez l'enfant (74 %), la dysphonie. Les fausses routes, surtout salivaires, les douleurs costales (71 %) à l'origine de crises aiguës de suffocation réagissant bien aux injections locales de lidocaïne. Les toux persistantes, le hoquet peuvent s'observer favorisés par les reflux gastro-œsophagien (72 % des cas), ainsi que, rarement, les pneumothorax. Ces derniers sont la conséquence de la fragilité tissulaire qui incite à être prudent avec les endoscopies. Les autres manifestations sont la conséquence du trouble proprioceptif généralisé qui caractérise le syndrome d'Ehlers-Danlos du fait de l'absence ou de la déformation des signaux émis par les capteurs, notamment les mécanorécepteurs, noyés dans un tissu conjonctif trop peu réactif, vers les centres respiratoires. De plus, une paroi abdominale trop lâche, offrant peu de résistance lors des contractions du diaphragme, également gênée par un ballonnement abdominal très fréquent, vient ajouter leurs effets propres. Les traitements préventifs sont gastro-intestinaux et thoraciques (vêtements compressifs proprioceptifs, exercices respiratoires, chant). L'oxygénothérapie et le percussionnaire chaque jour ou plusieurs fois par semaine ont permis d'améliorer considérablement les symptômes respiratoires et ont des effets remarquables sur la fatigue et les migraines comme le montre une étude rétrospective sur 100 cas et une étude prospective sur 30 cas avec des taux d'amélioration jugés très importants dans 47 % des cas pour la fatigue et 57 % pour les migraines.

En hommage au Docteur Forrest Morton Bird (débarquement de Normandie), aviateur, ingénieur, médecin ; inventeur du respirateur qui porte son nom et du percussionnaire, décédé pendant la rédaction de cet article.