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Claude Hamonet

 

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Cohabiter avec Ehlers-Danlos

La prévention des accidents iatrogènes

Expérience acquise auprès d’une cohorte de 6.000 patients pendant 25 ans

 

Ehlers-Danlos est une atteinte héréditaire par mutation génétique (transmise à tous les enfants, non liée au sexe), systémique (touchant de nombreux organes simultanément car elle concerne l’ensemble du tissu conjonctif dont le collagène et l’élastine) mais elle épargne le système nerveux. Ce dernier reçoit venant du corps (interne et externe) et de l’environnement (par les organes sensoriels), du fait des modifications de la structure des tissus conjonctifs, des signaux inappropriés (dans le sens de la diminution, voire de l’absence, de l’exagération ou de la déformation). Ceci explique les douleurs et autres sensorialités excessives (odorat, audition, vertiges), les troubles de la perception de l’espace, de la vision, de l’audition, les sensations de fatigue, les malaises, les difficultés motrices (dystonie, dysautonomie), les manifestations digestives (reflux gastriques, constipation) et vésicales, les troubles du sommeil et de la cognition (mémoire de travail, attention, concentration, orientation). L’autre cause de manifestations cliniques est la fragilité généralisée, parfois très importante des tissus concernés par la mutation génétique. Elle se manifeste au niveau de la peau qui est facilement le siège de vergetures, fragile, facilement blessée et qui cicatrise mal. Elle est douce au toucher, étirable, sa minceur explique qu’elle ne protège pas contre les effets de l’électricité statique, ce qui provoque des sensations de décharges électriques au contact d’un caddy ou en ouvrant une portière de voiture. Les petits vaisseaux sont fragiles expliquant la survenue d’ecchymoses, ce qui peut conduire, chez les enfants, à de fausses accusations de violences de la part des parents. Les muqueuses digestives sont également fragiles avec la présence de gingivorragies, d’épistaxis, de ménométrorragies, d’hémorragies digestives ou urinaires spontanées et aussi le risque d’accidents graves de perforations, mettant la vie en danger lors d’endoscopies digestives, comme nous l’avons observé récemment chez un nourrisson. La fragilité des méninges (risque de brèche méningée) incite à la prudence en lors des ponctions lombaires qui sont indiquées en cas de nécessité (anesthésie péridurale ou méningite). Ehlers-Danlos n’est pas une « maladie rare », mais au contraire fréquente (17 millions de personnes en Europe, 10 millions aux États-Unis, selon Brad Tinkle, 2017, USA). Leur expression est très variable dans une même famille y compris chez des jumelles homozygotes et, chez la même personne, d’un jour à l’autre. Malgré ces diversités d’expression, la maladie d’Ehlers-Danlos, parfois aussi appelée « syndrome d’Ehlers-Danlos », forme un ensemble homogène exposant aux mêmes complications et aux mêmes difficultés fonctionnelles. Malgré les progrès de la biologie appliquée à la médecine, le diagnostic reste clinique sur un regroupement significatifs de signes, et la constatation qu’ils existent chez d’autres membres de la famille, signant l’origine génétique avec plus de certitude que les test bio-génétiques, longs à obtenir et très souvent négatifs sans que l’on puisse élimer ce diagnostic. Ses signes sont nettement plus marqués chez les femmes.

 

A - Éviter Les gestes invasifs à risques

1 - La ponction artérielle, sauf nécessité absolue (pose d’un stent ou endartériectomie) et avec précautions, doit être évitée à cause du risque de dissection ou de rupture.

2 - La ponction lombaire, à visée diagnostique, sauf nécessité absolue. Elle peut être difficile à faire à cause des modifications des rapports anatomiques intervertébraux du fait de la laxité des vertèbres. Il y a un risque de brèche méningée avec des réactions douloureuses longues et très pénibles qui sont corrigées par la mise en place d’un « blood patch » (injection de sang autologue dans l’espace péridural) sans délai. Les péridurales, les rachianesthésies, souvent peu ou pas efficaces, doivent être réalisées avec précautions et suivies, en cas de blessure méningée rapidement d'un traitement par blood patch pour occulter la brèche. Sans attendre une hypothétique fermeture spontanée. Par contre, les épidurales ne sont pas contre indiquées lors d'un accouchement, contrairement à une notion qui a été répandue à tort, mais elles doivent être faîtes avec précautions et avec la possibilité de réaliser le « blood patch » en cas d’accident. Les infiltrations des racines du nerf sciatique ou de la queue de cheval de corticoïdes (habituellement sous contrôle d’imagerie) sont contrindiquées car inefficaces et source fréquentes d’aggravation avec de douleurs durables.

3 - Les endoscopies nasales, pharyngo-laryngées, trachéobronchiques, les cystoscopies, hystéroscopies doivent être effectuées avec douceur et prudence en guettant les réactions du patient… Aux œsophagoscopies, gastroscopies et coloscopies, il faut préférer les explorations par imagerie. Dans toutes ces investigations des hémorragies par lésion des muqueuses sont possibles et difficiles à contenir, des perforations ont également été observées. Les biopsies et exérèses de polypes doivent être évitées car ces lésions sont une manifestation habituelle de la maladie d’Ehlers-Danlos, ne dégénèrent pas et disparaissent habituellement spontanément et ne justifient que très exceptionnellement, du fait de leur volume ou de leur emplacement, une chirurgie.

4 - Les ponctions sternales et prélèvements osseux pour examen de la moelle osseuse ou de la structure de l’os sont à éviter ou à faire avec une grande prudence, à cause de la fragilité osseuse.

5 - Les ponctions pleurales, les exsuflations pour pneumothorax (accident non exceptionnel dans cette pathologie du collagène), les ponctions péricardiques (des péricardites peuvent se rencontrer) impliquent des précautions pour ne pas être traumatisantes mais sont généralement bien tolérées.

6 - Les ponctions articulaires ne sont indiquées que dans le traitement d’une hydarthrose (toujours possible chez ces patients, persistante et gênante) ou dans quelques cas rares d’hémarthrose. Elles sont à faire avec précautions (douleurs, saignements) précédées d’une anesthésie cutanée locale. Une exception doit être faîte pour les épaules « gelées » par algodystrophie avec injection par voie postérieure sous-acromiale lorsque les injections musculo-tendineuses des muscles péri-articulaires n’ont pas permis de libérer l’épaule, ce qui est rare.

7 - La multiplication de l’imagerie médicale est fréquente, conséquence des multiples douleurs ostéo-articulaires ou viscérales. Le plus souvent, elles sont inutiles et déroutent le médecin par leur négativité. L’examen systématique du rachis pour dépister une scoliose chez l’adolescent, préconisée par certains, est inutile puisque le dépistage de la scoliose est clinique en faisant dérouler le rachis à la recherche d’une déviation avec voussure lombaire et/ou une gibbosité dorsale. De plus, les faux diagnostics de scoliose sont fréquents si les radiographies sont faîtes debout provoquant une rotation du fait de l’hyperlaxité. Un cliché de face (le profil est inutile) en décubitus dorsal permettra de mesurer et de suivre l’évolution de l’angle de Cobb qui mesure la scoliose. Les scolioses ne provoquent pas de douleurs et n’expliquent pas celles qui sont dues à la maladie d’Ehlers-Danlos. L’économie des radiographies et des tomodensitométries permet de réduire l’exposition aux radiations ionisantes.

8 - Une conduite inappropriée en rééducation. La maladie d’Ehlers-Danlos s’inscrit en faux face à un préjugé, érigé en dogme par bon nombre de rééducateurs : le renforcement musculaire et l’activité physique sont un traitement efficace des douleurs musculo-tendineuses qu’il faut « dépasser » par un renforcement musculaire « vigoureux ». Dans cette maladie, le mouvement est créateur de douleurs, souvent durables, la rééducation ne doit jamais les provoquer et procéder, au besoin par paliers et en s’aidant du port des vêtements compressifs, des orthèses qui sont proprioceptives, d’une oxygénothérapie préalable, au besoin d’anti douleurs. Le fait de privilégier la rééducation isométrique et la kinébalnéothérapie permet de limiter le déclenchement des douleurs et de renforcer la proprioception qui est la cause principale des désordres moteurs. Le renforcement musculaire n’est pas nécessaire car il n’y a pas de « paralysie », pas de « neuropathie », mais un contrôle neuromusculaire mal adapté de l’activité musculaire.

9 - La restriction d’activité et d’activités sportives. Il est fréquent d’observer de la part des médecins des conseils de limitation d’activité et des certificats d’interdictions de sport, chez l’enfant en particulier. Certaines pratiques du sport, notamment en milieu scolaire où nous observons que l’esprit de compétition conduit à des efforts poussés à leur maximum peu compatibles avec Ehlers-Danlos ce qui a des effets négatifs (douleurs). Dans ce cas, le certificat de contre-indication est justifié mais pas l’interdiction de sports qui, au contraire, doit être encouragée. Aucun sport n’est à éliminer même les sports de combat qui connaissent un regain d’intérêt y compris chez les filles mais sans violence. Le Tai Chi apparaît comme une rééducation proprioceptive exemplaire. Ceux qui se pratiquent dans l’eau doivent être privilégiés si possible avec les vêtements compressifs ou des combinaisons de plongée. Les danses, l’équitation sont très recommandées ainsi que le tir à l’arc avec adaptations. L’attrait pour le sport fait même partie des signes clinique chez ces enfants qui ont un besoin très important de percevoir un corps qui « s’exprime » peu ou mal. Plusieurs patients acquièrent d’excellents niveaux et figurent parmi les champions nationaux français comme nous l’avons observé (équitation, gymnastique acrobatique). L’activité physique apparaît comme le traitement le plus important, qui peut suffire à lui seul à compenser les limitations fonctionnelles de la maladie. Une activité minimale quotidienne d’une heure doit être conseillée (Docteur Richard Amoretti, cardiologue, spécialiste de médecine du sport). L’inclusion dans des associations de sport adapté est souhaitable notamment pour l’équitation (Rééducation par l’équitation) avec inscription de cette pathologie parmi celles qui donnent le droit de participer aux futurs jeux Olympiques. Les effets du confinement ont bien démontré le rôle de l’activité physique puisque bon nombre de nos patients ont vu leurs symptômes s’accentuer dans cette période, conduisant parfois à de fausses suspicions de COVID-19 puisque les symptômes de ces deux pathologies systémiques se recoupent. Nous avons constaté que le traitement par l’oxygène et la vitamine D mis en place pour leur maladie d’Ehlers-Danlos a été un facteur d’évolution favorable chez nos patients à priori vulnérables, puisqu’ils ont fait des formes légères ou modérées, d’évolution favorable sans séquelle. Ceci incite à élargir ces prescriptions a toutes les personnes atteintes par la COVID.

 

B - Éviter Les traitements médicamenteux dangereux

1 - Les traitements anticoagulants : Héparine, anti vitamines K et antiagrégants plaquettaires à cause du risque hémorragique.

2 - Les morphiniques à cause du risque de modification pénible de la perception du corps, de leur inefficacité habituelle, de leurs effets secondaires (nausées, vomissements, occlusion surtout) et du risque d’addiction.

3 - Les corticoïdes, à l’exception des crises de dyspnée laryngée, du fait de l’altération du tissu osseux (fragilisé car c’est du collagène) et de la carence habituelle en vitamine D.

4 - Les anti dépresseurs et neuroleptiques qui atténuent la qualité des perceptions corporelles et environnementales et modifient les capacités cognitives à l’exception d’un traitement anti dépresseur aussi léger que possible qui peut être utile chez ces patients souvent inquiets et préoccupés.

5 - Les manipulations cervicales à cause de la mobilité excessive du cou qui peuvent entraîner des lésions artérielles et de l’absence de résistances habituelles aux mobilisations passives qui permettent de doser le geste du manipulateur qui peuvent déclencher des crises douloureuses diffuses très difficiles à contrôler comme nous l’avons observé.

6 - Les immobilisations après un désordre articulaire (pseudo-entorse ou luxation) car elles aggravent le trouble proprioceptif. Les contentions élastiques non agressives (risques d’arrachements cutanés avec l’élastoplaste). Le K-taping, utilisé chez les sportifs apparaît comme beaucoup mieux toléré et efficace.

7 - Les sutures en cas de plaie ou lors d’un geste chirurgical doivent tenir compte de la fragilité cutanée en utilisant du fil non résorbable, en évitant les agrafes et en laissant les fils suffisamment longtemps en place pour prévenir les désunions qui sont fréquentes.

8 - Les anti inflammatoires figurent parmi les traitements efficaces sur les douleurs portant difficiles à soulager de la maladie d’Ehlers-Danlos. Ils peuvent cependant être agressifs pour la muqueuse gastrique qu’il faut protéger par les inhibiteurs de la pompe à protons qui sont souvent prescrits du fait de la grande fréquence d’un reflux gastro-œsophagien et renforcés, si besoin, par des pansements gastriques comme le phosphalugel.

9 - La toxine botulique (Botox), très « à la mode » dans le traitement des contractures musculaires, agit en provoquant localement une dénervation. Il n’y a pas de contracture pyramidale dans la maladie d’Ehlers-Danlos. La toxine n’est pas indiquée tant au niveau des muscles des membres que para rachidiens ou de la vessie. Elle provoque une diminution de la force musculaire et peut exacerber les douleurs de façon durable.

10 - Le port de lentilles représente un risque important d’ulcérations de cornée, menaçant la vision, très difficiles à traiter, notamment par la chirurgie y compris de greffe du fait de la fragilité de ces tissus. Il est donc contre indiqué à l’exception de traitements de modélisation de la cornée indiqués dans quelques cas. Cette minceur de la cornée expose aussi à de la photophobie qui bénéficie du port de verres protecteurs contre les rayons du soleil et de verre filtrant la lumière bleue en présence de la lumière artificielle (ordinateur, phares de voiture, éclairage au néon).

 

C - La chirurgie

Les interventions chirurgicales sont souvent proposées chez les patients Ehlers-Danlos. Leur multiplicité suivie habituellement d’échec avec des cicatrisations difficiles et inesthétiques est évocatrice, en soi, du diagnostic. L’investissement chirurgical nous est apparu particulièrement important chez les enfants face aux instabilités articulaires. Elles sont, sauf quelques exceptions, le plus souvent à éviter, d’autres solutions doivent être préférées.

La chirurgie peut être nécessaire. Ne pas la faire serait l’erreur.

Précautions générales à respecter lors d’un geste chirurgical, incluant l’obstétrique (césarienne, déchirure du périnée) et la chirurgie dentaire. L’anesthésie locale ou locorégionale est souvent défaillante (ce qui surprend toujours les praticiens mais constitue un excellent signe d’orientation diagnostique). Il faut alors répéter ou renforcer les doses et au besoin (anesthésie dentaire) adjoindre de l’Adrénaline. L’anesthésie générale a des effets parfois limités avec des réveils précoces impliquant une reprise du processus anesthésique. La position de l’opéré(e) est très importante pour éviter les compressions nerveuses du fait de la minceur et de l’étirabilité des tissus qui ne protègent par le nerf cubital au coude, le nerf médian au poignet, le plexus brachial dans le défilé des scalènes, le nerf sciatique poplité externe au genou. Les dissections doivent être prudentes sur des tissus fragiles qui supportent mal les agrafes et les sutures (qui doivent être faîtes avec des fils non résorbables, laissés suffisamment de temps en place). L’hémostase doit être très minutieuse, la surveillance post opératoire attentive.

Une indication formelle : la présence de calculs vésiculaires. Ils nous semblent plus fréquents que dans l’ensemble de la population probablement du fait de la stagnation de la bile dans une vésicule très laxe, se contractant mal, s’infectant facilement mais dont les parois sont minces à l’imagerie et faciles à perforer. Les péritonites, parfois gangréneuses, difficiles à traiter du fait du développement de collections purulentes dans les replis d’un péritoine étirable et sièges parfois d’adhérences sont la complication qui peut avoir des conséquences vitales en cas de retard de diagnostic. Celui-ci est difficile à faire avec une paroi trop souple, des douleurs difficiles à localiser et une fièvre « incertaine » du fait d’une thermorégulation défaillante. Ces calculs, parfois volumineux et nombreux peuvent s’observer, dans notre expérience dès l’âge de 7 ans, doivent être recherchés par une échographie systématique tous les ans. Leur diagnostic implique l’exérèse avec les précautions habituelles face aux hémorragies, aux risques de lâchage de sutures et aux problèmes d’anesthésie.

L’appendicite figure aussi parmi les indications formelles pour les mêmes raisons de complications infectieuses et de risque de péritonite grave.

L’utérus est à l’origine d’hémorragies utérines souvent très abondantes avec un retentissement hématologique, parfois provoquées par la présence d’un fibrome volumineux peut conduire à une chirurgie d’exérèse ou à une hystérectomie.

Les lésions osseuses, les délais de consolidation (fractures, ostéotomies) sont prolongés. Les greffons osseux ont tendance à « fondre » (rôle probable de l'ostéopénie habituelle et d’une mauvaise vascularisation du fait des troubles vasomoteurs d'origine neurovégétative), notamment lors de la mise en place de butées antérieures de l'épaule qui est contre-indiquée dans les luxations (en fait pluridirectionnelles) des épaules de cette pathologie. Les ostéosynthèses (fractures, ostéotomies) sont souvent mal tolérées et instables. Elles ont cependant des indications formelles devant un syndrome d’Arnold-Chiari (parfois associé) ou une instabilité vertébrale majeure. Il convient d’être prudent avant de poser un diagnostic de fracture sans déplacement devant les images de « pseudo traits de refend » au niveau des épiphyses des os longs chez de jeunes enfants pouvant aboutir à de fausses accusations de violences comme nous l’avons observé.

La chirurgie orthopédique est abusivement pratiquée avec parfois des interventions itératives (intervention sur une lésion méniscale ou les ligaments croisés, transplantation musculaire de stabilisation sur une articulation siège de luxations récidivantes, fixation d’une rotule instable, chirurgie de la capsule articulaire). L’étirabilité excessive, la fragilité des structures concernées, jointes aux difficultés proprioceptives accentuées par la chirurgie et les réactions algodystrophiques secondaires sont à l’origine des échecs. Dans de rares cas, la chirurgie de l’épaule a pu donner quelques résultats, combinée aux orthèses.

La chirurgie digestive est difficile à contrôler. Elle comporte des risques de complications per et post opératoires (désunion, occlusions, troubles du transit, douleurs). Elle apparaît comme une solution ultime. La chirurgie bariatrique s’adresse à l’obésité qui est fréquente dans la maladie d’Ehlers-Danlos. Il s’agit de la gastrectomie (Sleeve) ou du By Pass qui semblent moins à risques que de la chirurgie de l’anneau gastrique. Pour les reflux gastro-œsophagiens, les traitements médicamenteux doivent être préférés. Les hernies diaphragmatiques sont possibles mais très rares et doivent être opérées avec les précautions habituelles. Les occlusions, les perforations intestinales peuvent conduire à des résections suivies d’un rétablissement de continuité, plus rarement à un abouchement définitif à la paroi. La chirurgie doit être conservatrice et éviter des mutilations intestinales qui ne sont pas justifiées par un risque de récidive. La chirurgie des hémorroïdes et des prolapsus rectaux est à éviter.

Les hernies abdominales sont fréquentes et ne doivent être opérées qu’en cas de gêne fonctionnelle ou de complication. Les hernies de la ligne blanche bénéficient rarement de la chirurgie et la mise en place de « plaques » se solde habituellement par un échec (glissement de la prothèse). Les ceintures et bandages herniaires sont préférables.

La chirurgie vésicale et périnéale, souvent appliquée, à l’instar des indications dans les vessies neurologiques en méconnaissance de la maladie d’Ehlers-Danlos, est peu efficace dans les dysfonctionnements vésico-sphinctériens (bandelette sous-urétrale) et surtout les prolapsus.

Les kystes sont fréquents dans la maladie d’Ehlers-Danlos. Ils peuvent siéger dans toutes les parties du corps (ovaires, articulations, foie, pancréas, maxillaires, crâne, poumons, seins). Ils régressent spontanément ou bien ils se développent et peuvent faire l’objet d’une intervention chirurgicale s’ils sont compressifs ou inesthétiques. Les nodules sont également fréquents, leurs localisations sont multiples (parfois au niveau de la thyroïde ou de l’hypophyse), leur évolution est identique à celle des kystes. Les uns comme les autres ne dégénèrent pas. On peut en rapprocher les lipomes, les angiomes également peu évolutifs mais fréquents.

 

Conclusion provisoire

La multiplicité des lésions et des symptômes observés dans cette maladie héréditaire du collagène expose à des interprétations inappropriées qui conduisent, comme nous l’observons quotidiennement, à des complications iatrogènes parfois d’une extrême gravité. Leur prévention réside dans une connaissance élargie par tous les médecins de la fragilité de ces patients. Cette prévention s’étend aux autres membres de la famille (ascendants, collatéraux et descendants), chez lesquels un examen clinique attentif permettra de dépister précocement, sans attendre la survenue de complications révélatrices, une maladie qui bénéficie aujourd’hui de thérapeutiques qui permettent d’améliorer considérablement la qualité de vie et de développer les aptitudes et la créativité qui sont largement observées chez ces personnes.

 

Références

Hamonet Cl., Ducret L., Baeza-Velasco, Layadi K., Ehlers-Danlos-Tschernogoubov. Histoire contrariée d'une maladie. Communication à la Société française d'Histoire de la Médecine, Université Paris-Descartes, 16 janvier 2016. Publication : Histoire des Sciences médicales, Tome L N°1-2016, P29.

Hamonet CL. et collaborateurs : Syndrome d’Ehlers-Danlos, validation d’une échelle clinique somatosensorielle à propos de 626 cas, présentation à l’Académie nationale de Médecine, 28 février 2017. Publication dans le Bulletin de l’Académie nationale de Médecine 2017, 201, nos 1-2-3, 405-415.

Claude Hamonet, Ehlers-Danlos, la maladie oubliée par la médecine, l’Harmattan, Paris 2018, réédition 2019.

Stéphane Daens, Apprivoiser le syndrome d’Ehlers-Danlos : Une vision globale de la maladie. La révolution épigénétique. Les situations d’urgence. GERSED Belgique 2020. Diffusion Amazon.fr

 

Paris le 22 octobre 2020