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Pr. Claude HAMONET,
Consultation du syndrome d’Ehlers Danlos, Service de Médecine Physique et de Réadaptation (Dr J.Y. Maigne), Hôtel Dieu de Paris.
Centre de référence de la maladie de Fabry et des maladies héréditaires du tissu conjonctif (mucopolysaccharidoses, pseudoxanthome élastique et syndromes d’Ehlers-Danlos), Service de Génétique médicale (Professeur Dominique P. Germain) Hôpital Raymond Poincaré, 92380 GARCHES.
Avec le soutien de la Fondation de France
Le syndrome a été initialement remarquablement décrit, à partir d’une seule observation, d’un étudiant en Droit, présentée par Edvard Ehlers, à la Société danoise de Dermatologie le 15 décembre 1900. Il a malheureusement été réduit (ou presque), quelques années plus tard (1908) par Henri-Alexandre Danlos, à un étirement excessif de la peau, encore considéré, à tort, par certains comme étant un signe nécessaire au diagnostic, alors qu’il est inconstant.
En fait, le syndrome d’Ehlers Danlos apparaît aujourd’hui comme une affection génétique à expression polymorphe du tissu conjonctif par altérations du collagène, transmise le plus souvent sur le mode autosomique dominant.
C’est ce polymorphisme de la symptomatologie qui permet le diagnostic puisqu’il est l’expression d’une origine commune des manifestations cliniques : la modification de la structure du tissu conjonctif qui est moins épais, plus fragile et qui a perdu son élasticité.
C’est aussi ce polymorphisme qui conduit souvent à des diagnostics erronés du fait d’un regroupement symptomatique inapproprié. C’est ainsi que ces patients sont souvent identifiés comme ayant une fibromyalgie, une maladie neurologique (sclérose en plaque notamment), rhumatismale (pelvi spondylite, polyarthrite, fibromyalgie surtout), digestive (Crohn, maladie cœliaque), respiratoire (asthme) et bien souvent, devant la négativité des bilans radiologiques et biologiques et l’intensité des symptômes, de « psychiatriques ».
Ces mauvaises orientations ne sont pas anodines car ces patients sont fragiles et certains gestes diagnostics (ponction lombaire, avec risque de brèche méningée, certaines endoscopies) ou thérapeutiques (chirurgie orthopédique ou viscérale, manipulations surtout cervicales) peuvent avoir des conséquences sévères.
La qualification de maladie rare est probablement à revoir. En effet, un seul médecin dans une Maison départementale des personnes handicapée qui a été formé à ce syndrome, a dépisté, dans le cadre de son activité, 18 cas en 5 ans, la plupart diagnostiqués comme étant des personnes avec une fibromyalgie.
Par contre, il s’agit bien d’une maladie orpheline parce que quasiment ignorée par le corps médical.
Le diagnostic est seulement clinique, il n’y pas de test biologique, histologique ou génétique à l’exception des très rares formes dites « vasculaires ».
Il se fait sur les éléments suivants, que nous avons classés en 3 groupes, en nous basant sur notre expérience acquise par l’examen que nous avons personnellement effectué et l’observation de plus de 600 personnes chez lesquelles ce diagnostic a été posé. Ceci pour clarifier une séméiologie riche et complexe.
(Les chiffres fournis sont établis sur une population de 455 personnes avec un Syndrome d’Ehlers-Danlos.)
Un autre élément diagnostic de poids est la constatation de cas identiques dans la famille.
Nous les avons souvent rencontrés chez les patients ayant un syndrome d’Ehlers Danlos ; ils contribuent, par leur présence et leur nombre, au diagnostic :
Un affaissement plantaire parfois associé à une rétraction plantaire, les troubles de déglutition, les fausses-routes, la dysphonie, les otites à répétition dans l’enfance, la sécheresse conjonctivale, les modifications morphologiques cardiovasculaires (modifications valvulaires, dilatations aortiques ou des gros vaisseaux) ce qui implique une surveillance tous les deux ans par échodoppler, généralement sans conséquence, à l’inverse de formes rares dites « vasculaires », les crises de tachycardie sinusale, les hernies de la paroi abdominale, les atteintes vésiculaires (calculs, syndromes pseudo-inflammatoires) les altérations dentaires (caries, fragilité, implantations anarchiques, déchaussement), des kystes endocriniens (thyroïdiens, ovariens), la dyspareunie.
La survenue de ces manifestations est très variable dans le temps et d’une personne à l’autre (y compris dans la même famille). Leur regroupement est donc diversifiée (l’absence d’un élément ne pouvant, en aucun cas exclure ce diagnostic), dans un cadre évolutif totalement imprévisible.
Le nombre de formes frustes ou potentielles (déclenchées par un traumatisme violent par exemple) est probablement très élevé, ce qui rend, parfois, l’enquête génétique difficile.
La physiopathologie semble dominée par l’absence ou la mauvaise qualité de la sollicitation des capteurs placés dans le tissu conjonctif qui n’informent pas correctement les centres de régulation de la vie végétative et de relation.
Le traitement vise à agir sur ce mécanisme en augmentant les sollicitations au niveau des capteurs (vêtements compressifs, kinésithérapie proprioceptive, orthèses à effet proprioceptif…), en calmant la douleur (neurostimulation, chaleur, massages…) en agissant sur la fatigue (rééducation respiratoire par percussionnaire, oxygénothérapie). D’autres thérapeutiques antidouleurs, a visées digestive, gynécologiques, cardiovasculaires ou respiratoires ont aussi leur place.