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Claude Hamonet

 

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Mise au point séméiologique : Ehlers-Danlos, un syndrome raide ignoré ?

La place de l’hypermobilité dans le diagnostic de la maladie/syndrome d’Ehlers-Danlos.
Une remise en cause nécessaire devant la réalité des faits cliniques.

 

L’absence de test génétique, la non spécificité des résultats des biopsies, le côté aléatoire des résultats des cultures de collagène, font qu’actuellement le diagnostic de syndrome ou maladie d’Ehlers-Danlos repose sur les seuls critères cliniques qui sont suffisants pour affirmer, avec certitude, le diagnostic.

Parmi ces critères, l’un des plus probants et des mieux reconnus par la communauté médicale, est l’hypermobilité (ou hyperlaxité) articulaire. Depuis plusieurs années, il a largement supplanté l’étirabilité excessive de la peau chère à Danlos mais très souvent absente. Par contre, reléguant au deuxième plan des signes pourtant très évocateurs tels que les hémorragies, la fatigue, les douleurs diffuses et rebelles, la tendance que nous observons est de faire de l’hypermobilité un critère indispensable pour poser le diagnostic.

Cette attitude n’est pas réaliste. En effet, dans de nombreux cas on retrouve une hypermobilité dans l’enfance, avec la possibilité de faire un grand écart facial, de mettre un pied derrière la tête, ou bien, à plat ventre, de toucher l’occiput avec les talons, alors que, 20 ou 30 ans plus tard, il n’est plus possible de toucher le sol, même avec le bout des doigts ! L’hypermobilité peut diminuer avec l’augmentation en âge. Elle peut, aussi, être difficile à apprécier en phase douloureuse et/ou de tensions musculaires si fréquentes dans ce contexte. Elle peut aussi, rarement cependant, être totalement absente, même dans l’enfance, alors qu’elle existe chez les autres membres de la famille et que les autres signes du SED sont présents chez la personne sans hypermobilité.

Il convient aussi de se pencher sur la méthode de mesure de l’hypermobilité. Un test s’est imposé, celui de Beighton. Il s’agit d’un score sur un total de 9 points, établi en comptabilisant l’hypermobilité de 5 articulations (poignet, métacarpo-phalangienne du 5ème doigt, coude, genoux et hanches lors de la flexion en avant pour toucher le sol avec la paume des mains). Ce test été fortement critiqué lors du Premier symposium international organisé à Gand (Belgique) en septembre 2012 : les résultats varient d’un examinateur à l’autre, leur façon de pratiquer le test n’est pas identique. Le choix des articulations testées aussi est discutable. L’oubli de l’épaule, l’une des articulations qui pose le plus de problèmes, est difficile à accepter. Surtout, l’examen attentif de la mobilité articulaire du membre inférieur met en évidence des rétractions musculo-tendineuses (genoux et chevilles) chez une majorité de patients ayant un syndrome d’Ehlers-Danlos avec pour corollaires fréquents, la négativité du test de la paume au sol et de l’hyperextension des genoux. Ces constatations remettent en question la validité du test de Beighton et, plus généralement, le fait que l’hypermobilité est une caractéristique incontournable du syndrome d’Ehlers-Danlos puisque la rétraction musculo-tendineuses est l’une de ses manifestations presque constante. Retrouvée dans 88% des cas lors d’une première étude que nous avons présentée au Premier symposium international sur le Syndrome d’Ehlers-Danlos à Gand les 8-9 septembre 2012 ; elle est confirmée par une nouvelle étude sur 230 cas qui retrouve exactement le même chiffre de prévalence de 86%. Ces rétractions sont précoces (59% dans le groupe des enfants de 10 ans et moins. Ceci change complètement le regard porté jusqu’ici sur cette maladie et ouvre des perspectives pour la recherche de ses mécanismes physiopathologiques, Les conséquences sur la séméiologie et donc le diagnostic de la maladie est considérable : un score de Beighton jugé insuffisant, ne doit pas faire éliminer le diagnostic si d’autres signes probants sont présents et que l’on retrouve un contexte familial donc génétique. D’autre part, une rétraction chez un jeune enfant doit faire systématiquement rechercher les autres signes de la maladie d’Ehlers-Danlos.

 

Référence

Cl. Hamonet, E. Vlamynck, N. Serre. Rétractions des muscles ischio-jambiers et syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile. Conséquences sur la mesure du test de Beighton. Discussion sur la valeur diagnostique de ce test. A propos de 119 cas. Premier symposium international sur le syndrome d’Ehlers-Danlos, 8-12 septembre 2012, Gand, Belgique.