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Claude Hamonet

 

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Guérir rapidement le mal de dos par un traitement simple et
sans risque : une opportunité à la portée de tout médecin

(Note technique et pratique sur l’apport des injections non radiculaires)

 

Introduction

De la curabilité du mal de dos

Par mal de dos, nous entendons la présence de douleurs situées entre les bords supérieurs des trapèzes et les plis des fesses.

Contrairement à une idée reçue, malheureusement fortement ancrée dans les esprits des médecins et des usagers de la santé, elles ne sont pas, dans leur très grande majorité, d’origine discale ni radiculaire. Elles trouvent leur origine dans des lésions minimes (mais très douloureuses) des parties molles fortement innervées, ligamentaires et/ou musculo-tendineuses de cette région. Ces structures sont sous cutanées, donc facilement accessibles à une aiguille fine pour y introduire un principe thérapeutique actif (en l’occurrence de la cortisone à effet local) dans le but de traiter l’inflammation mais aussi de réparer la lésion.

Malheureusement, par prudence excessive ou par ignorance, cette technique est encore trop peu pratiquée. Elle constitue pourtant la méthode la plus efficace, la plus rapide, la moins dangereuse, la plus durable et la moins coûteuse qui permette de guérir le mal de dos. Nous donnons ici des précisions sur leur usage, issues d’une expérience personnelle d’une trentaine d’années de pratique.

 

« Infiltrations » ou « injections »

Le poids des mots est très important pour les personnes souffrant d’un mal de dos. Elles sont souvent traumatisées par les commentaires alarmistes et les thérapeutiques des médecins. Il en est ainsi pour les infiltrations des racines du sciatique souvent douloureuses et à l’efficacité incertaine.

Le mot « infiltration » véhicule une atmosphère d’effraction du corps, de violence, dans des zones « sensibles », très mal vécue par le patient. C’est pourquoi à la question : « est-ce une infiltration ? » il vaut mieux répondre : « c’est une injection avec une aiguille fine utilisée pour les vaccins. Ce n’est pas douloureux. De plus, nous injectons, en même temps, un produit anesthésique. »

 

Les produits injectés et la préparation de l’injection

Ils sont au nombre de deux : la cortisone et la xylocaÏne. La cortisone se présente sous la forme de microcristaux et diffuse localement pendant plusieurs jours. Dans notre expérience, l’effet maximum est obtenu avec deux injections séparées par un intervalle de deux semaines environ.

Le corticoïde est dans une seringue plastique qui fait partie d’un dispositif comportant tout le nécessaire à injection, un piston à visser sur la seringue, une aiguille longue (intra musculaire) et une aiguille courte et fine (sous-cutanée).

Nous mélangeons, pour moitié, la cortisone avec la xylocaïne à 0,5 % prélevée dans un flacon, à part, à l’aide de l’aiguille longue.

Le fait que le piston de la seringue reste bien en place après remplissage, sans risque de glisser, avec perte du contenu de la seringue, est un point de détail pratique important. Ceci nous fait préférer l’un des produits actuellement sur le marché (Diprostène).

Nous excluons la xylocaïne chez des sujets allergiques qui ont déjà fait des réactions à la xylocaïne (lors de soins dentaires par exemple) ou bien lorsqu’après la première injection on observe une éruption cutanée.

 

La réalisation de l’injection

Un principe intangible : toujours effectuer l’injection sur une personne en décubitus, sur le ventre, bras le long du corps ou de chaque côté de la table d’examen. Si l’on veut mieux dégager la région lombo-pelvienne, il faut placer le patient couché en travers de la table.

L’aiguille courte est suffisante pour atteindre la plupart des sites à injecter chez les sujets maigres car ils sont, le plus souvent, directement sous cutanés. Pour certaines injections (insertions des rotateurs de la hanche par exemple, la région ischiatique, le moyen fessier), c’est alors une aiguille intramusculaire qu’il faut pour atteindre la lésion. Ceci peut être un peu plus douloureux.

Le lieu de l’injection est repéré, en collaboration avec le patient, qui contribue ainsi à son propre diagnostic. Il se fait en palpant soigneusement avec la pulpe du pouce ou de l’index (au besoin en augmentant la force de pression à l’aide d’un doigt de l’autre main) les zones qu’il désigne comme étant douloureuses en cherchant à reproduire la douleur pour laquelle il consulte. « Demandez-leur de vous montrer avec un doigt là où ils ont mal », nous a enseigné Stanislas de Sèze lorsque nous étions son interne.

Il s’agit habituellement des espaces inter épineux (L5-S1 surtout), de la région para sacrée haute (ailerons sacrés), très souvent, ou plus basse ; du rebord de la partie interne de la crête iliaque (ligament ilio-sacré), du bord supérieur du grand trochanter (moyen fessier), du bord postérieur du trochanter (pelvi-trochantériens), de l’ischion (muscles ischio-jambiers).

Le long de la colonne vertébrale siègent les douleurs liées à une lésion des articulaires postérieures ou de la branche postérieure du nerf rachidien. L’injection se fait, selon la technique de Maigne, « loco dolenti », à un travers de doigt (15 mm) de la ligne des épineuses, à l’horizontale de l’espace intervertébral. L’aiguille est enfoncée jusqu’au contact osseux, l’injection se fait sans résistance, sinon on déplace légèrement l’aiguille. Au niveau dorsal il convient de bien s’assurer de la direction du trajet de l’aiguille et de veiller à ne pas être trop latéral pour éviter la plèvre. Toutes ces injections peuvent s’effectuer sans contrôle d’imagerie conjoint, au cabinet du médecin, à la fin de la consultation. Lors de l’injection, il convient de déplacer doucement l’aiguille (au besoin « en étoile ») pour injecter la zone la plus large possible.

Il nous parait très utile d’en généraliser la pratique pour optimiser les résultats du traitement du mal de dos qui exerce des ravages considérables dans le monde du travail : il est la première cause d’exclusion du travail avant 40 ans.

Sous l’effet de l’anesthésique local, on obtient une rémission immédiate des douleurs, ce qui une valeur diagnostique importante pour le médecin et pour le malade mais aussi une valeur pronostique : si on obtient cette rémission immédiate, on peut considérer que l’on peut obtenir une rémission définitive, selon le principe de faisabilité utilisé dans les sciences de l’ingénieur. Ceci indique probablement que le produit injecté est en bonne place. Pour s’en assurer, on peut reprendre l’injection jusqu’à la disparition totale des douleurs.

 

Les conseils après injection(s)

Il faut prévenir le patient qu’après la sédation immédiate et pour une heure environ des douleurs, on peut assister à une reprise, parfois violente, dans les heures ou jours qui suivent. Ce phénomène est plutôt de bon augure, car il indique que le produit est en bonne place, la distension des tissus de la zone douloureuse provoquant une exacerbation des sensations douloureuses. Cette phase est suivie d’une période d’amélioration parfois très importante avec une reprise modérée des douleurs jusqu’à la deuxième injection qui, elle, n’est pas suivie d’un phénomène de rebond.

Une troisième injection est rarement nécessaire.

Durant la période d’action du produit (un mois environ), même s’il y a une très grosse amélioration, il est conseillé sur des lésions fragilisées de ne pas reprendre d’activités physiques trop intenses d’emblée et d’attendre une cicatrisation suffisante des lésions (6 semaines environ). Le port d’une ceinture lombaire de type lombaskin ou lombacross activity est nécessaire pour éviter les mouvements nocifs, diminuer les contraintes sur la région et, par frottement cutané, avoir un effet antalgique. Elle ne gêne en rien l’activité musculaire qu’elle favorise, au contraire.

 

Contre-indications, précautions particulières

Un traitement anti-agrégant ou anticoagulant n’est pas un obstacle, tout au plus, il y aura une ecchymose. Le diabète n’est pas une contrindication mais impose, s’il est insulino dépendant de surveiller plus particulièrement les paramètres biologiques et, au besoin, d’augmenter la dose d’insuline.

 

Conclusion

L’injection de cortisone et de xylocaïne est le geste, de loin le plus efficace dans la grande majorité des cas de mal de dos. Sa réalisation rapide peut limiter le temps d’exclusion du travail et restreindre la consommation en bilans et en soins, surtout médicamenteux. Ce geste, anodin si on respecte les précautions que nous avons indiquées peut être effectué dès le premier examen de la personne qui a mal au dos par le généraliste, sans radiographie préalable mais toujours après un bref mais bon examen clinique incluant, en particulier, une palpation minutieuse.

 

Bibliographie

Hamonet Cl., Prévenir et guérir de mal de dos, Odile Jacob, Paris, 2007.

Maigne J.Y., Le mal de dos, pour une prise en charge efficace. Deuxième édition. Elsevier-Masson, 2009.