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« Un grand savoir sur le corps…Un piètre savoir sur l’Homme souffrant » (David Lebreton, anthropologue).
Les altérations du corps de la personne qui entraînent des modifications de son apparence et de l’image que les autres perçoivent d’elle jouent un rôle fondamental dans les mécanismes de discrimination, de rejets et d’exclusions. Elles trouvent leurs origines dans des représentations qui marquent profondément les comportements et qui entretiennent les mécanismes de l’exclusion jusqu’à maintenant.
Les origines de ce phénomène sont complexes, elles doivent être analysées pour comprendre ce qui parait souvent incompréhensible et pour essayer d’agir sur des préjugés qui prennent leurs racines dans la constitution même des sociétés humaines. Celles-ci ont, depuis leurs débuts, constamment balancé entre inclusion et exclusion, tolérance et rejet.
Au départ, il y a corps infirmes (de "infirmus", latin, non ferme, non solide c’est-à-dire : faibles, ce qui a aussi donné infirmière). Cette dénomination est associée à des représentations dégradantes de pauvreté (mendiants) et de malhonnêteté (voleur). Il y a amalgame entre anomalie du corps et dégradation de l’âme. L’impureté du corps est rattachée, dans un raccourci dramatique, à celle de l’âme. Ceci explique que les corps perçus comme "anormaux", déviants ont été éliminés socialement ou même "physiquement" dans l’Histoire de l’Humanité. À cet égard, certains fondements culturels induisent des préjugés qui mêlent le biologique et le sacré. « Tout homme qui a en lui une tare ne peut approcher, qu’il soit aveugle ou boiteux, défiguré ou disproportionné, ou bien un homme qui a une fracture du pied ou une fracture de la main, ou s’il est bossu ou atrophié, s’il a une tâche dans son œil, s’il est galeux ou dartreux s’il a un testicule broyé, tout prêtre qui a une tare… ne s’avancera pas pour offrir les sacrifices par le feu à Iahvé. » (Lévitique XXI). Ces à priori ne sont pas le fait seulement d’attitudes religieuses auxquelles on peut adjoindre les malheureux atteints de la danse de Saint-Guy qui ont été brûlés comme possédés du démon au Moyen-Âge et les "folles" de la Salpétrière qui ont été massacrées par les "sans-culottes" au motif d’un complot contre la République, sans oublier le massacre des enfants et adulte anormaux perpétrés par les nazis au nom de la pureté de la race.
Ces corps différents sont stigmatisés (comme ceci est bien développé dans l’ouvrage d’Erwig Goffman, "Stigmate"), marqués et "souillés". C’est ce qu’exprime bien Paul Ricoeur « … avec la souillure nous entrons au règne de la terreur », cité par Mary Douglas dans "Purity and danger", publié en France sous le titre "La souillure".
On approche ainsi de la notion de monstruosité ("monstrare", latin, celui qu’on montre du doigt) qui mêle fascination et curiosité (de la mythologie aux "Freak show", et de la médecine à Frankenstein, le monstre, l’anormal, a toujours fasciné) et terreur : la peur de l’anormal du différent. Elle allie l’étrange à l’anormal et induit la notion de danger pour le groupe. On retrouve aussi l’attribution de pouvoirs spéciaux pas toujours bénéfiques. C’est dire que la revendication au « droit à la différence » (à la déficience ?) n’est pas sans risques et est, en fait, une mise en situation d’infériorité face à la « norme sociale ». Enfin il y a la question de l’honneur et de la charité. L’atteinte du corps est « l’injure suprême » (Y. Lambert-Faivre, "Réparation du préjudice corporel"). « Tout affront physique est un affront à l’honneur… » (J. Pitt-Rivers, "Anthropologie de l’honneur"). La charité ayant, elle aussi, son utilité sociale en aidant les riches à "gagner leur ciel". Tous ces éléments interfèrent cruellement dans la découverte et l’annonce d’une "anomalie", terme banal pour un médecin, verdict social terrible pour la famille et l’intéressé.
Il convient donc de mettre en valeur d’autres définitions : « Abandonner l’idée préconçue de la déficience comme seule caractéristique de la personne… pour en venir à la nécessité d’éliminer les barrières, de réviser les normes sociales, politiques et culturelles, ainsi qu’à la promotion d’un environnement accessible et accueillant. » (Déclaration de Madrid, mai 2002. Texte disponible sur le site de l’université Nancy 2 au format PDF : pour télécharger, faites un clic droit, puis sélectionnez "Enregistrer la cible…". Pour ouvrir le document dans une nouvelle fenêtre, faites un clic gauche.)
« CONSTITUE UNE SITUATION DE HANDICAP LE FAIT, POUR UNE PERSONNE, DE SE TROUVER, DE FAÇON DURABLE, LIMITÉE DANS SES ACTIVITÉS PERSONNELLES OU RESTREINTE DANS SA PARTICIPATION À LA VIE SOCIALE DU FAIT DE LA CONFRONTATION INTERACTIVE ENTRE SES FONCTIONS PHYSIQUES, SENSORIELLES, MENTALES ET PSYCHIQUES LORSQU’UNE OU PLUSIEURS SONT ALTÉRÉES ET, D’AUTRE PART, LES CONTRAINTES DE SON CADRE DE VIE »